Chaque semaine, une image parmi les 55 000 prises par Olivier Prévôt a été publiée sur ce site afin d'illustrer la diversité de ses intérêts, des personnes qu'il a rencontrées et des lieux qu'il a parcourus.
Pêcheur - le 21 février 2010, Tunceli, Turquie
Fin février, début mars 2010, Olivier effectua un nouveau séjour dans l'extrême Est de la Turquie. Il commença par la ville de Tunceli et y resta près d'une semaine.
Il est allé voir le barrage d'Uzunçayir qui avait été achevé moins de dix ans plus tôt. C'était un de nos projets : un reportage du très vaste programme turc de construction de barrages dans l'Est anatolien - le programme GAP -. Ce travail, qu'il a mené au fil de ses voyages - une fois aux périls de sa vie, alors qu'il revenait d'un chantier, poursuivi par les loups -, devra être conclu par un catalogue et, si possible, une exposition.
Aux abords du barrage, il rencontra des pêcheurs au filet. Bien que rien ne le signalât sinon le barrage en surplomb, ce devait être au niveau de la sortie de la conduite forcée de la centrale hydroélectrique où les tourbillons devaient attirer les poissons, en particulier les espèces amphihalines, dont peut-être le saumon. Il oublia le barrage (pas tout à fait : il en a pris de splendides vues). Et il photographia les pêcheurs. Un, en particulier, attira son attention : il prit 17 photographies de lui. Il les nota toutes mal : peut-être s'en voulait-il de la séduction que cet homme a exercé sur lui.
L'image est l'avant-dernière de la série. Le jeune homme regarde Olivier, avec un semi sourire, presque un clin d'œil aussi. On ne voit que lui, avec son chandail rouge. L'arrière plan est complètement flou, avec un fouillis de broussailles et un ciel blanchâtre. Il se détache par sa netteté et les seules couleurs franches de l'image.
Ce portrait reste assez particulier dans l'œuvre photographique d'Olivier. là, il se laisse « prendre », il renonce à la maîtrise de l'image. Il n' y a pas de décentrement du sujet. Il n'a pas de premier plan ni d'arrière plan omniprésent. Il ne subsiste que l'attraction irrésistible du jeune homme, de son regard qu'il porte sur lui. C'est un portrait à deux, et c'est probablement là son plus grand intérêt.
De la série des vues qu'il a prise du jeune homme, j'en ai retenu six autres, présentées ci-dessous chronologiquement.
Il s'agit de la toute première, que j'aime aussi beaucoup. On pourrait l'intituler La rencontre : le jeune homme est encore interrogateur, il a sa cigarette, il déploie son filet et regarde Olivier. Le barrage est visible, flou, en arrière plan.
Dans toutes ces photographies, le jeune homme se consacre au jeter de son filet. Il ne semble qu'en apparence ignorer Olivier. L'on distingue déjà dans la dernière image le léger sourire de se savoir photographié. Il devait entendre les déclenchements de l'appareil, il lance aussi son filet pour la photographie.
Les photographies de ce séjour ont presque toutes été exceptionnelles et plusieurs ont déjà fait l'objet d'une publication dans l'ouvrage Dans la nuit kurde. Il a surtout photographié la ville de Tunceli, qui pourrait être le sujet à lui seul d'un prochain catalogue.
Image du 26 octobre 2020 - semaine 44 de 2020.
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